Étude de cas dans le secteur textile et énergétique : les risques climat

Paris, le 8 juillet 2020 – Pour parvenir à limiter le changement climatique et ses effets, l’incertitude des interactions entre les systèmes climatique, macroéconomique et microéconomique constitue une source de risques et d’opportunités pour les acteurs économiques de manière directe ou indirecte. Changements physiques (interruption d’activités liée à des catastrophes naturelles ou à des événements ...

Magdalena Jouenne-Mazurek

8 juil 2020 9 minutes de lecture

Paris, le 8 juillet 2020 – Pour parvenir à limiter le changement climatique et ses effets, l’incertitude des interactions entre les systèmes climatique, macroéconomique et microéconomique constitue une source de risques et d’opportunités pour les acteurs économiques de manière directe ou indirecte. Changements physiques (interruption d’activités liée à des catastrophes naturelles ou à des événements météorologiques, comme les inondations, etc.), macroéconomiques (politique, social, juridique, économique, etc.) ou microéconomiques (consommateurs, entreprises, investisseurs), qui se propagent au sein de l’économie réelle et de la sphère financière.

EcoAct définit le risque climatique comme le croisement de deux typologies de facteurs :

  • L’exposition à des facteurs externes à l’organisation : aléas climatiques tendanciels ou extrêmes pour les risques physiques ; facteurs réglementaires, sectoriels ou liés au changement de comportement des consommateurs pour les risques de transition ;
  • La vulnérabilité à des facteurs internes à l’organisation : facteurs de répartition des coûts ou revenus par activité, pays ou site couplés aux ressources mobilisables pour adapter le modèle d’affaires aux conditions futures (capacité d’adaptation).

Si ces risques physiques ou de transition liés au climat concernent tous les secteurs économiques et toutes les zones géographiques dans le monde, certains secteurs et régions seront plus ou moins exposés aux impacts du changement climatique ou aux mesures et changements socio-économiques liés à la transition bas-carbone.

Développer une analyse par scénarios pour anticiper les risques climat

Pour préparer leur transition bas-carbone dans ce futur imprévisible et non-linéaire, les entreprises peuvent s’appuyer sur un certain nombre de modèles macroéconomiques publics, principalement conçus pour l’évaluation des politiques publiques ou des recherches académiques, qui intègrent les enjeux climatiques et énergétiques. 

En complément, une méthode appropriée aux décisions microéconomiques des entreprises consiste à développer une analyse de scénarios énergie-climat « sur-mesure », qui permet d’alimenter la prise de décision, en identifiant les enjeux futurs essentiels à considérer en période d’incertitude. Dans le contexte du climat, cette approche peut être utilisée pour faciliter d’une part l’appropriation des enjeux de la transition bas-carbone au niveau de l’entreprise, et d’autre part la conduite du changement à opérer au sein de l’entreprise.

Ces scénarios n’essaient pas de prévoir l’avenir, mais ils doivent permettre aux entreprises de visualiser plusieurs mondes futurs réalisables et de comprendre les différentes voies possibles (voir études de cas ci-dessous).

Les investisseurs aussi demandent des comptes aux entreprises

Si de plus en plus d’entreprises s’engagent dans une stratégie climat, c’est aussi parce que l’alignement et la résilience des stratégies et des plans d’investissements futurs des entreprises avec un monde bas-carbone sont de plus en plus examinés par leurs parties prenantes, notamment par leurs investisseurs. 

Depuis 2015, avec la signature de l’accord de Paris, les entreprises sont de plus en plus sollicitées pour fournir des informations sur leur stratégie climatique et leur capacité à s’adapter pour faire face aux évolutions actuelles et futures liées à la transition bas-carbone.

Plusieurs cadres de référence sur le reporting d’informations financières et extra-financières mentionnent les risques climatiques et mobilisent ou obligent les entreprises à fournir une analyse de leurs risques et opportunités (TCFD, accords de Paris, CDP, article 173 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV), Commission européenne, etc.).

Études de cas : le secteur textile et énergétique

Risque de transition « de marché » : l’évolution de la disponibilité des matières premières pour le secteur textile

Le contexte : la production de viscose impactée par les effets du changement climatique

Les matières premières utilisées dans le secteur textile sont particulièrement exposées aux impacts du changement climatique, impacts qui vont continuer à augmenter dans le futur. Le principal risque qui ressort est celui du stress hydrique, sur les cultures, mais aussi sur les processus de transformation notamment sur la phase de teinture des tissus. La viscose, une fibre de cellulose fabriquée par l’être humain, ne fait pas exception. En plus du stress hydrique, étant un dérivé du bois, la viscose est également exposée au risque de feu de forêt, qui augmente avec le changement climatique. Enfin, le circuit logistique des différents rangs de fournisseurs peut être perturbé par des inondations qui, selon les zones du monde concernées, pourraient augmenter avec le changement climatique.

Les facteurs à analyser :

Facteurs externes : le risque de feu de forêt sur les fournisseurs de l’industrie forestière, de stress hydrique et d’inondations sur les fournisseurs, les politiques nationales de gestion de l’eau et des forêts.
Facteurs internes : le % des revenus associés à l’utilisation de la viscose, le % de viscose durable (Ecolabel de l’UE, incluant des process plus économes en eau) acheté, la quantité de viscose achetée à chacun des fournisseurs, etc.

L’analyse de l’évolution de ces différents facteurs permet d’identifier les pays d’approvisionnement ou les fournisseurs les plus à risque dans le futur. Il est par exemple possible de déterminer le % de stock de viscose à risque de stress hydrique ou d’inondations. Ces informations aident les équipes Achats à prioriser certains fournisseurs ou à en accompagner d’autres dans la transformation de leurs process, par exemple la mise en place de systèmes de récupération de l’eau, afin d’améliorer leur capacité d’adaptation et de les rendre plus résilients au risque de stress hydrique.

Opportunité de transition « autoconsommation d’énergies renouvelables » : l’évaluation des coûts et bénéfices associés à l’indépendance énergétique 

Le contexte : un marché de l’électricité en transformation

La baisse continue du prix des technologies photovoltaïques et éoliennes crée de nouvelles opportunités dans le domaine de l’énergie. Dans un nombre croissant de marchés ces technologies deviennent compétitives par rapport aux énergies fossiles – ce, malgré l’arrêt progressif des mécanismes de soutien tarifaire aux énergies renouvelables (ENR). La consolidation de l’industrie photovoltaïque depuis 2006 ainsi que la baisse du coût du financement offrent de la visibilité quant à l’évolution du Leverage Cost of Electricity (LCOE) et facilitent la planification énergétique.
Par ailleurs, les incertitudes croissantes sur l’évolution du prix de l’électricité poussent les entreprises à mettre en place de nouvelles stratégies de couverture.

Dans ce contexte de pression à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et de transformation des marchés de l’énergie, de nouveaux mécanismes – réglementaires et de marché – facilitant l’accès au renouvelable apparaissent. Preuve de ces nouvelles opportunités, 235 multinationales de premier plan se sont engagées à travers l’initiative RE100 à atteindre les 100 % de renouvelable.

Les facteurs à analyser :

Facteurs externes : politiques carbone, mécanismes de soutien aux énergies renouvelables et évolution de la réglementation des marchés de l’énergie, développement des technologies renouvelables et potentiel renouvelable des différentes régions.
Facteurs internes : type d’activité (intensité énergétique, profil des consommations électriques et type d’implantations), facture électrique (notamment coûts d’approvisionnement en électricité) et stratégie énergétique et climatique de l’entreprise.

Solutions : 

Il s’agit dans un premier temps de formaliser la stratégie énergétique de l’entreprise et sa contribution aux réductions de gaz à effet de serre. Une analyse du volume et du profil des consommations électriques, ainsi que des ressources techniques dont dispose l’entreprise permettra de préciser le rôle que peut jouer le renouvelable dans sa stratégie énergétique afin de l’orienter vers les mécanismes les plus pertinents : autoproduction, les contrats à plus long terme, voire garantie d’origine.

Une analyse comparative approfondie basée sur la facture électrique actuelle et différentes trajectoires de prix de l’électricité de marché permet de préciser l’intérêt financier du projet (taux de rentabilité interne, temps de retour…) et d’identifier les points de bascule.
Finalement, il est nécessaire d’avoir une approche globale de la stratégie carbone de l’entreprise : la contribution de la trajectoire ENR aux réductions des émissions de CO2 doit être prise en compte et l’impact du prix du carbone interne sur la rentabilité d’un projet ENR également étudié.

Plus qu’une nouvelle contrainte de reporting, l’analyse par scénarios des risques et opportunités liés au climat est un véritable outil stratégique pour les entreprises.

Cet exercice exploratoire permet de mieux appréhender les évolutions possibles du modèle d’affaire et d’identifier les options stratégiques à déclencher selon l’évolution du contexte socio-économique dans les années à venir.

Encore sous-utilisée par les entreprises, la démarche d’analyse par scénarios mériterait d’être davantage mise en place afin de se préparer au monde de demain. L’approche d’EcoAct en quatre étapes permet d’aborder l’analyse par scénarios en s’insérant facilement dans les processus de gestion des risques déjà en place en entreprise.

A propos d’EcoAct

EcoAct est une société́ internationale de conseil et de développement de projets qui accompagne entreprises, organisations, institutions et territoires afin de leur offrir la gamme de solutions la plus performante et la plus complète permettant de relever efficacement les défis du changement climatique. Fondée en France en 2006 par Thierry Fornas et Gérald Maradan, EcoAct a su se développer à l’international et possède à présent des bureaux dans 7 pays et 3 continents à travers le monde (Paris, Londres, New-York, Barcelone, Ankara, Embu au Kenya et Darfour). Elle a été élue meilleure société de conseil sur le marché́ carbone volontaire pendant quatre années consécutives (2015 à 2018), ainsi que porteuse du meilleur projet de compensation carbone volontaire en 2019 par Environmental Finance.

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