Marché européen du carbone : rapport 2021 sur l’état de l’EU ETS

La sixième édition du rapport sur l’état du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE-UE, EU-ETS), « State of the EU ETS », vient de paraître. Produit en collaboration avec l’ERCST (European Round on Climate and Sustainable Transition), BloombergNEF, le centre de recherche Wegener Center de l’Université de Graz en Autriche, et EcoAct, ce rapport annuel a pour objectif de ...

Emilie Alberola

15 avr 2021 6 minutes de lecture

La sixième édition du rapport sur l’état du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (SEQE-UE, EU-ETS), « State of the EU ETS », vient de paraître. Produit en collaboration avec l’ERCST (European Round on Climate and Sustainable Transition), BloombergNEF, le centre de recherche Wegener Center de l’Université de Graz en Autriche, et EcoAct, ce rapport annuel a pour objectif de fournir une contribution indépendante au débat politique sur le rôle et l’efficacité du marché européen du carbone.

Ce nouveau rapport examine l’année 2020 qui marque la fin de la 3ème phase (2013-2020) du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne (EU ETS), qui peut être considérée comme une période de réformes et d’ajustements constants de l’EU ETS pour corriger ses défauts de conception et permettre à l’EU ETS de jouer un rôle croissant dans la décarbonation des secteurs européens de l’énergie et de l’industrie.

En fin de phase 2 (2008-2012), l’EU ETS s’était trouvé en difficulté avec un excédent de quotas important, accompagné d’un prix du quota très faible, qui ont persisté jusqu’en 2018. Ses défauts de conception, principalement liés à l’impossible ajustement de l’offre à d’éventuels chocs significatifs de la demande et à l’afflux d’un montant élevé de crédits internationaux de carbone, ont été reconnus et largement traités par un certain nombre de mesures, en particulier l’introduction de la réserve de stabilité du marché (Market Stability Reserve).

Bien que cette phase 3 (2013-2020) ait été marquée par des ajustements réglementaires, une reprise économique et un prix du quota EUA faible, l’objectif environnemental de l’EU ETS a été atteint et même dépassé.

Cependant, ce n’est pas le signal de prix qui a motivé cette réalisation, mais d’autres politiques qui ont été principalement mises en place dans le secteur de l’électricité. Malgré une crise économique profonde dans ce contexte du Covid-19, la confiance dans l’ETS en tant qu’outil de décarbonation de l’UE demeure.

L’EU ETS est maintenant au début d’une nouvelle phase, la phase 4 allant jusqu’en 2030, avec une ambition renforcée qui va être à nouveau révisée pour s’aligner sur l’ambition de la neutralité carbone en 2050. En effet, le niveau d’ambition de l’UE est passé à un objectif d’au moins -55 % de réduction nette des gaz à effet de serre (GES) d’ici à 2030, et l’EU ETS devra être ajusté à ces nouvelles circonstances. La Commission européenne devrait présenter sa proposition de révision de l’EU ETS en juin 2021. La décarbonisation des secteurs de l’énergie et de l’industrie en Europe doit être durable et la révision de l’EU ETS en 2021 est essentielle dans cette équation.

Messages clés de l’édition 2021 :

Efficacité environnementale de l’EU ETS

  • Les émissions de CO2 de l’EU ETS ont baissé de 10,6 % en 2020 contre 9,6 % en 2019. Plus précisément, elles ont diminué de 13,9 % dans le secteur électrique et de 7,3 % dans l’industrie en 2020.
  • En 2020, les émissions de CO2 ont diminué près de 4,2 fois plus vite que ce que la réglementation l’exigeait par le respect du plafond d’émissions, ce qui représente la baisse la plus importante depuis 2013.
  • Les secteurs pour lesquels des données sont disponibles ont montré des améliorations annuelles de l’intensité en carbone limitées, comme les secteurs du verre, des métaux, du raffinage et du papier avec une tendance au cours de la phase 3 largement stable.
  • L’EU ETS a atteint son objectif de réduction d’émissions de la phase 3 (-21 % d’émissions de CO2 en 2020 par rapport à 2005) dès 2014. Au total, les émissions de l’EU ETS ont diminué de -42,2 % entre 2005 et 2020.
  • Au-delà de 2020, l’objectif de l’EU ETS fixé à – 43 % d’émissions de CO2 pour 2030 ne sera pas suffisant pour que l’UE atteigne son ambition climatique à long terme de neutralité carbone d’ici à 2050.

Efficacité économique 

  • Pour l’année 2020, le prix européen du carbone (EUA) a été supérieur au prix minimum incitatif pour la substitution des combustibles de production d’électricité entre les centrales au charbon et au gaz à faible, moyenne et même haute efficacité thermique.
  • L’enquête sur le sentiment du marché a montré une confiance accrue dans le fait que l’EU ETS fournisse un cadre stable et prévisible pour un signal d’investissement.
  • En ce qui concerne la protection des secteurs industriels à risque de fuite de carbone, 2020 a été la 4ème année consécutive où l’ensemble des installations industrielles a connu un coût direct net : au total au cours de la phase 3, les installations industrielles dans leur ensemble ont un déficit net de 15 millions de quotas gratuits par rapport à leurs émissions vérifiées, représentant une valorisation estimée à environ 1,7 milliard d’euros.
  • En 2020, le revenu des enchères est passé de 14,6 milliards d’euros en 2019 à 19,16 milliards d’euros. Cette augmentation est principalement attribuable au Royaume-Uni, qui a mis aux enchères ses volumes de quotas de 2019 et 2020 l’année dernière. Cependant, les revenus des États membres de l’UE27 ont également augmenté de 13 % par rapport à 2019. Au total, les revenus cumulés des enchères s’élèvent à 69 milliards d’euros au cours de la phase 3.

Fonctionnement du marché européen d’échange de quotas en 2020

  • Dans l’ensemble, le marché des quotas CO2 a connu une bonne année 2020, surtout compte tenu de la pandémie de Covid-19. La plupart des indicateurs de performance clés sont restés à des niveaux similaires à ceux de 2019. Cela montre que les acteurs du marché n’ont pas été perturbés par les risques associés au Covid-19.
  • En 2020, malgré la forte baisse des émissions vérifiées, l’offre est restée inférieure à la demande en raison du retrait de 354 millions de quotas (EUA) par la MSR (Réserve de Stabilité de Marché), conduisant à un montant de quotas en circulation de 1 266 millions.
  • Avec un prix du CO2 évoluant dans une fourchette de 16 €/tCO2 à 35 €/tCO2, l’EU ETS a révélé en 2020 un niveau de prix du carbone jamais observé depuis près d’une décennie. L’année 2021 a même débuté avec un prix du carbone supérieur à 40 €.
  • En 2020, les volumes de transactions de quotas CO2 ont augmenté de 22 % par rapport à 2019. Les volumes échangés ont atteint 2,74 milliards au 4ème trimestre de 2020, le deuxième plus élevé depuis 2011.
  • Les indicateurs de participation aux enchères, de volatilité et d’intérêt ouvert sont restés stables en 2020, alors que les indicateurs de couverture des enchères (qui estime la demande des participants) et l’écart de prix entre le prix aux enchères et celui sur le marché secondaire se sont détériorés.
  • Il y a un fort consensus parmi les analystes de marché qui ont révisé leurs prévisions de prix pour la période 2021-2030 à la hausse, en estimant un niveau entre 70 €/tCO2 et 105 € en 2030.

Découvrez le rapport complet (uniquement en version anglaise), en cliquant ici.

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