La France, engagée sur la trajectoire de la neutralité carbone à l’horizon 2050, a mis en place un cadre méthodologique national innovant : le Label bas-carbone, pour valoriser et financer les projets carbone contribuant à l’atteinte de cet objectif ambitieux. Après un peu plus de 5 ans, nous vous proposons de faire un bilan de ce dispositif.
Premier cadre de certification carbone adopté par la France, il permet de soutenir des projets d’atténuation du changement climatique, en leurs ouvrant des perspectives de financement de la part de collectivités locales, d’entreprises et des financeurs qui agissent de manière volontaire pour le climat. Ce label, dont le décret et l’arrêté ont été publiés en novembre 20181, a été lancé officiellement le 23 avril 2019 par le Ministère de la Transition écologique et ses partenaires.
Trois premières méthodologies forestières ont été adoptées en avril 2019, suivies de près par des méthodologies agricoles. Aujourd’hui, de nombreux secteurs sont couverts par les méthodes du Label.
Voici un tour d’horizon des méthodes validées :
La forêt française occupe près de 26 millions d’hectares, soit 31 % du territoire métropolitain2. Avec près de 87 millions de tonnes équivalent CO2 séquestrées par an3, elle représente un puits de carbone essentiel qu’il est important de préserver et renforcer.
Pour assurer la pérennité de la filière et atteindre les objectifs de la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC), il est primordial de favoriser un renouvellement et une gestion durable des massifs français en adaptant les essences de nos forêts aux évolutions des conditions climatiques et aux nouvelles opportunités de valorisation des produits bois.
Le secteur agricole est quant à lui bien particulier, étant à la fois émissif (émissions des élevages, cultures et engins) mais aussi un puits de carbone (séquestration dans les sols et grâce aux cultures). Il a représenté en 2023 plus de 75 millions de tonnes de CO2 émises en France4 : c’est un enjeu de décarbonation crucial. Les objectifs visés par la SNBC pour ce secteur planifient une réduction de -18 % d’émissions en 2030 par rapport à 20155.
Pour atteindre ces ambitions, les agriculteurs et agricultrices ont besoin d’être accompagnés, financièrement et par des formations, à l’aide de mécanismes fiables.
Le Label bas-carbone et ses méthodologies viennent apporter un outil de financement innovant au service de différentes filières.
Un décret du 28 novembre 2018 définit des conditions principales pour les projets6 :
Récemment, le 20 février 2025, les versions 3 des méthodes boisement et reboisement ont été validées et rendues publiques. Largement attendue, ces méthodes viennent apporter des réponses à de nombreuses questions posées depuis la création du Label. Parmi les principales modifications, nous pouvons trouver :
Ces encadrements vont permettre de monter des projets plus robustes, mais vont aussi signifier une hausse de prix significative.
Lors d’une annonce faite par la ministre Mme Pannier Runacher le 17 février dernier, les unités de réduction permises par le Label bas-carbone pourraient devenir cessibles dans un avenir proche.
Cela signifie concrètement qu’après qu’un financeur ait été reconnu par le registre du ministère, il pourrait revendre son crédit à un second financeur.
Cette possibilité a été avancée en réponse à de nombreuses questions sur la place du Label face aux standards internationaux, sur la prise en compte des crédits en tant qu’actifs aux bilans des entreprises, et sur l’acceptation du Label pour la CSRD ou encore le mécanisme CORSIA.
Toutefois, cette cessibilité envisagée soulève en parallèle de nombreuses inquiétudes. Comment palier l’aspect spéculatif qui s’infusera manifestement dans les transactions ? Comment contrôler ces achats et reventes ? Comment rendre un marché transparent sans altérer sa stabilité ?
Une consultation publique sera disponible dans les prochaines semaines, pour permettre à toutes les parties prenantes de s’exprimer sur le sujet.
Début mars 2025, les projets pilotes montés par le Centre national de la Propriété forestière (CNPF) en 2020 ont été audités7. Aujourd’hui, ce sont 3 projets qui sont validés, et qui voient leurs réductions d’émissions confirmées.
De nombreux projets devront être audités à leur tour courant 2025, une étape charnière pour le Label. Ces audits, performés par un tiers indépendant, permettront de rendre compte de la robustesse du standard, et d’analyser les premiers projets à avoir vu le jour !