Vers une finance décarbonée

Face à l’impératif d’une transition vers une économie bas-carbone, un nombre croissant d’acteurs du monde financier se saisit des sujets relatifs au carbone et au climat. Des méthodologies et des solutions émergent pour faciliter les opérations de décarbonation des portefeuilles, alignées sur une trajectoire 1,5°-2°C. L’empreinte carbone : une première étape S’engager sur le chemin ...

Magdalena Jouenne-Mazurek

15 Fév 2019 4 minutes de lecture

Face à l’impératif d’une transition vers une économie bas-carbone, un nombre croissant d’acteurs du monde financier se saisit des sujets relatifs au carbone et au climat. Des méthodologies et des solutions émergent pour faciliter les opérations de décarbonation des portefeuilles, alignées sur une trajectoire 1,5°-2°C.

L’empreinte carbone : une première étape

S’engager sur le chemin de la neutralité carbone, c’est d’abord évaluer son empreinte carbone. Or, si la mesure de l’empreinte carbone est un exercice plus ou moins aisé pour une entreprise industrielle, elle s’avère plus complexe pour les émissions de carbone de différentes entreprises au sein d’un même portefeuille d’actifs. Et la tâche se complexifie davantage quand il faut tenir compte des portefeuilles d’investissement mélangeant des actions, des obligations et des prêts aux entreprises et particuliers.

De l’évaluation à la gestion des risques climat

A mesure que les alertes se multiplient et s’intensifient concernant le changement climatique, la pression se fait croissante pour l’intégrer comme un risque financier et mettre en œuvre une stratégie d’investissement résiliente aux risques climatiques.

Ainsi, dans le contexte français, l’article 173 de la loi de Transition énergétique pour la croissance verte oblige les investisseurs institutionnels et gestionnaires d’actifs à évaluer et rendre compte de leur exposition aux risques climatiques (physiques et de transition) dans leurs portefeuilles, ainsi que de leur contribution à la transition vers une économie à faible émission de carbone. Une obligation qui rejoint les recommandations du groupe de travail international sur la transparence des risques financiers liés au climat (TCFD) et passe notamment par l’évaluation de l’exposition de ses investissements aux scénarios climatiques du GIEC.

L’article 173 : bilan depuis son entrée en vigueur

Cet article 173 a valu à la France une place honorable parmi les États investis dans la lutte contre le changement climatique. Pourtant, 2 ans après sa première application, de nombreux investisseurs et gestionnaires d’actifs rencontrent des difficultés à mettre en œuvre cette obligation légale.

A première vue, il parait relativement aisé de cumuler les émissions de carbone de toutes les entreprises présentes dans son portefeuille d’investissement pour exprimer ses émissions globales. Toutefois, des questionnements peuvent surgir :

A quoi les rapporte-t-on au juste ? Comment mesurer et additionner les émissions de GES d’actions cotées et non cotées, d’instruments de dette, etc. ? Et comment évaluer le niveau d’alignement sur une trajectoire 1,5 – 2°C (selon l’initiative Science Based Targets) de son portefeuille quand les entreprises qui le composent n’ont pas elles-mêmes fait l’exercice ?

Champs d’application et solutions

En France, où l’épargne individuelle est massivement investie en produits d’assurance vie, les compagnies d’assurance jouent un rôle particulièrement important en matière de finance. Les difficultés évoquées plus haut expliquent sans doute pourquoi, aujourd’hui, seuls trois assureurs français sont capables de préciser publiquement quelle température terrestre globale est financée à travers leur gestion d’actifs.

C’est pourquoi des méthodologies sont en cours de développement et de restitution dans différents groupes de travail, à l’instar de « Risque Climat et Méthodologie » conduit par l’initiative Finance for Tomorrow auquel EcoAct contribue.

La Fédération Française de l’Assurance a examiné la problématique d’évaluation des risques climat des portefeuilles d’investissement et propose une liste de ces méthodologies et des acteurs spécialisés, dont EcoAct qui fait aujourd’hui référence en matière d’évaluation des risques climatiques du portefeuille d’investissements multi actifs. Nous avons en effet développé une méthodologie et un outil informatique dédié permettant d’apporter des solutions aux enjeux des portefeuilles d’investissement multi actifs. 

En synthèse, une meilleure compréhension de la performance climatique et des risques et opportunités associés est une condition sine qua non de leur prise en compte dans les décisions d’investissements. Qu’il s’agisse d’un gestionnaire d’actifs, d’un particulier ou d’un institutionnel, il est essentiel d’identifier les trajectoires d’émissions financées lors de l’allocation du capital. C’est ainsi que la finance décarbonée pourra contribuer à lutter contre le réchauffement climatique à l’échelle qui s’impose.