COP 26 : que peut-on en attendre ?

Repoussée d’un an en raison de la crise sanitaire, la COP 26 se tiendra finalement à Glasgow du 31 octobre au 12 novembre, sous la présidence du Royaume-Uni en partenariat avec l’Italie. Cette présidence inscrit la 26ème conférence des Nations unies dans la continuité des sommets du G7 et du G20, que les deux pays ...

Anouk Faure

6 oct 2021 7 minutes de lecture

Repoussée d’un an en raison de la crise sanitaire, la COP 26 se tiendra finalement à Glasgow du 31 octobre au 12 novembre, sous la présidence du Royaume-Uni en partenariat avec l’Italie. Cette présidence inscrit la 26ème conférence des Nations unies dans la continuité des sommets du G7 et du G20, que les deux pays accueillent également, dans une volonté de porter les enjeux climatiques au même plan que la reprise économique.

L’année 2021 est en effet importante pour les négociations internationales sur le climat car les contributions déterminées au niveau national (CDN) des Parties signataires de l’Accord de Paris sont renouvelées et examinées pour la première fois depuis la COP21 dans le cadre du Global Stocktake quinquennal. Or, le premier rapport de synthèse de la CNUCCC (Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques) avertit que la fenêtre d’action se resserre pour atteindre les objectifs de Paris. En effet, les CDN disponibles de l’ensemble des 191 pays[1] impliquent une augmentation d’environ 16 % des émissions mondiales de GES en 2030 par rapport à 2010. Selon les dernières conclusions du GIEC, une telle augmentation pourrait entraîner une hausse de la température globale d’environ 2,7 °C d’ici à la fin du siècle.

Source : UNFCCC, 17 September 2021. Nationally determined contributions under the Paris Agreement: Synthesis report by the secretariat.

 

La Présidence de la COP 26 exhorte ainsi l’ensemble des pays à revoir à la hausse leurs CDN en s’appuyant sur des mesures nationales. L’Italie ainsi que le Royaume-Uni se sont en effet engagés à atteindre zéro émission nette[2] d’ici à 2050, et le Royaume-Uni à sortir du charbon à l’horizon 2025 et à mettre fin à la vente des véhicules thermiques d’ici à 2030.

Quels résultats feraient de la COP 26 un succès ?

  1. Des NDC renforcées à horizon 2030 et alignées avec l’objectif de neutralité carbone

Le dernier rapport du GIEC montre que pour limiter l’augmentation de la température globale à 1,5 °C par rapport au niveau préindustriel, les émissions mondiales de gaz à effet de serre doivent atteindre zéro émission nette d’ici au milieu du siècle.[3]  Seul un renforcement important des actions en faveur du climat à l’horizon 2030 peut permettre de rendre cet objectif accessible. A ce jour, la moitié des pays n’a pas encore révisé leurs CDN, y compris certains pays fortement émetteurs comme la Chine et l’Inde. De son côté, l’Union européenne a, conformément au Pacte vert pour le Climat, révisé sa CDN en faveur de la neutralité carbone à l’horizon 2050. Le paquet « Fit for 55 » décline le portefeuille de mesures nécessaires pour y parvenir.

COP 26 climate targets

Source : Climate action tracker

Conformément à l’article 4 de l’Accord de Paris, les gouvernements doivent par ailleurs formuler leur stratégie de long terme pour 2050 (Long-Term Low Emissions Development Strategies). Déclinées en feuilles de route sectorielles, ces stratégies sont un point attendu de la COP 26 puisque seuls 33 pays ont soumis la leur, en dépit d’une échéance en 2020. En France, il s’agit de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC).

  1. Un accord sur la finance climat

En 2009 à Copenhague, les pays développés se sont engagés à mobiliser 100 milliards de dollars US par an d’ici à 2020 pour soutenir les pays en développement dans leurs actions d’atténuation et d’adaptation au changement climatique. Cet engagement a été prolongé pour une durée de 5 ans lors de la COP 21, et la finance climat entérinée à l’Article 9 de l’Accord de Paris. Toutefois, un peu moins de 80 milliards de dollars de financements publics et privés ont été mobilisés en 2019 d’après les chiffres de l’OCDE, ce qui a considérablement érodé la confiance entre les pays développés et ceux en développement.

Par ailleurs, les gouvernements devront trouver un accord sur le prolongement du programme de travail sur la finance climat Long-Term Climate Finance (LTF)[5] ou définir un processus supplémentaire, le cas échéant, pour superviser les flux financiers jusqu’en 2025. La feuille de route post-2025 devra elle aussi être tranchée.[6]

  1. Une feuille de route pour l’adaptation au changement climatique

Face aux nombreuses conséquences du changement climatique, des actions d’adaptation renforcées et coordonnées, ainsi qu’un soutien technique et financier aux pays les plus touchés sont nécessaires. Le Comité d’Adaptation, créé en 2010, est l’organe de la CNUCC dédié à la mise en œuvre du volet adaptation de l’Accord de Paris et s’est accordé sur un programme de travail pour 2022-2024 lors de sa 20ème réunion le 10 septembre dernier.

Durant la COP 26, le Comité devra fournir une évaluation des progrès accomplis et de l’efficacité de son action. Par ailleurs, chaque pays devra renseigner une Adaptation Communication qui constitue leur feuille de route sur le volet de l’adaptation avec les mesures prévues et les besoins identifiés.

  1. Un accord sur l’Article 6 de l’Accord de Paris

L’Article 6 donne aux pays la possibilité de s’appuyer sur la coopération internationale pour atteindre et dépasser leurs CDN, sous la forme de mécanismes fondés — ou non — sur le marché (marchés carbone). En d’autres termes, cette coopération permettrait aux pays qui investissent dans des projets de réduction d’émissions dans d’autres pays de comptabiliser ces réductions pour l’atteinte de leurs propres objectifs.

Pour certains, l’Article 6 offre un moyen d’accroître considérablement l’ambition climatique en réduisant les coûts d’atténuation et en mobilisant les financements du secteur privé. Pour d’autres toutefois, un mauvais règlement sur l’Article 6 risque de saper l’ambition de l’Accord de Paris en autorisant notamment le double compte des réductions d’émissions ou l’émission de crédits carbone de mauvaise qualité.[7]

Constituant la dernière pièce du « livre des règles » de l’Accord de Paris à être résolue après l’adoption du reste du règlement fin 2018, un accord sur l’opérationnalisation de l’Article 6 est très attendu à la COP 26 dans le contexte d’accélération nécessaire de l’ambition climatique.

 

 

[1] Les CDN évaluées comprennent celles qui ont été nouvellement transmises ou mises à jour, soit environ 49 % des émissions mondiales de GES.

[2] Selon le GIEC, zéro émission nette signifie que les émissions anthropiques de gaz à effet de serre dans l’atmosphère sont équilibrées par les absorptions anthropiques sur une période donnée.

[3] IPCC, 2018: Summary for Policymakers. p.6.

[5] Le programme de travail sur la finance climat de long terme (LTF) a pour but de quantifier les progrès des pays développés au sens de la CNUCCC en matière de finance climat et d’en informer les pays en développement (communications biennales, portail en ligne dédié, ateliers et dialogues ministériels biennaux…)

[6] C2ES. 2021.Climate Finance issues for COP26. https://www.c2es.org/wp-content/uploads/2021/06/Climate-Finance-Issues-for-COP26.pdf

[7] Pour aller plus loin, voir Carbon Brief. In-depth Q&A: How ‘Article 6’ carbon markets could ‘make or break’ the Paris Agreement. Novembre 2019.

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